La Maison Internationale de Guèlèdè de Savè se meurt. Le musée perd petitement son éclat au grand plaisir des autorités en charge du tourisme et de la culture au Bénin et au grand dam des populations. Nous avons été dans cette institution muséale. Le constat est choquant. Dans ce numéro du Vendredi des Patrimoines et du Tourisme, nous en parlons…. Suivez notre regard…
En 2003 où l’ex Ministre de la Culture, Frédéric Dohou posait la première pierre de son érection, la Maison Internationale de Guèlèdè de Savè devrait servir de cadre pour la promotion des recherches en patrimoine immatériel d’une part et offrir d’autre part aux enseignants – chercheurs, étudiants et toute personne éprise de la culture un véritable espace d’étude et de réflexion sur le guèlèdè.
Treize ans après, sur les huit modules annoncés, le seul construit se dégrade faute d’entretien. L’extérieur du musée présente à première vue l’aspect d’un centre non fréquenté. Rats et reptiles ont érigé leur refuge dans les hautes herbes qui dictent, sans crainte, leur loi dans la grande cour.
A l’intérieur, la remarque est alarmante. Déjà à l’entrée, poussière, toiles d’araignées et même odeurs nauséabondes vous accueillent. Tout ce qui s’y trouve sent la terre sèche et fine. Les masques et autres objets liés au Guèlèdè subissent de mauvais traitements. Pour exemple, la case de consultation de l’oracle est désormais branlante.
Selon Fidèle Chabi, le seul natif de Savè qui continue de déployer ses énergies pour la survie de ce musée, « plusieurs objets de cette case sont envoyés au Brésil pour une exposition d’un mois en 2008. Mais jusqu’à l’heure, ils y sont toujours ». Il en est de même, regrette –t-il, de la géante sculpture de guèlèdè partie dans un hôtel de la place, sur instruction d’un ancien ministre et qui n’est jamais revenue dans le musée.
Alors, c’est une évidence qu’au-delà de la dégradation, la maison internationale de guèlèdè de Savè voit aussi s’envoler pour d’autres destinations ses objets qui, pourtant, constituent, chacun, une partie de l’histoire de ce patrimoine.
Le désengagement de l’Etat central et le silence des cadres de Savè
La Maison Internationale de Guèlèdè de Savè est un musée, complexe immobilier, lequel est composé de trois zones.
La première abritera le monument (ce qui n’a pas été fait), le parking, l’administration et la salle de conférences.
La deuxième zone est l’aire d’un espace central circulaire qui devra servir de tribune pour les activités culturelles, d’une salle polyvalente, des salles spécialisées et d’une cantine. La troisième zone, quant à elle, est destinée aux logements des chercheurs. Sur ces trois zones, seule la première est réalisée et, soulignons- le, pas complètement.
Mais pour ‘’le peu’’ réalisé, l’Etat s’affiche incapable de sa gestion. Depuis que l’édifice est installé, aucun Ministre de la culture, a-t-on appris de source digne de foi, n’y a mis pied. Or, c’est une institution sous son autorité, laquelle a été bâtie grâce aux efforts conjoints de l’Unesco et de l’Etat béninois. Ainsi, apparaît clairement, la négligence sinon le laisser – aller dont les gouvernants centraux font montre. C’est une attitude débraillée qu’il est important de souligner, en ce moment où le pouvoir veut ramener de la France les biens culturels du pays.
Sur le banc des accusés, on compte également les cadres de Savè. Ils s’étaient battus farouchement pour obtenir la construction de l’infrastructure muséale sur leur territoire. L’histoire raconte que c’était un véritable bras de fer entre Kétou et Savè. Aujourd’hui malgré les bonnes grâces gouvernementale pour les uns et parlementaire pour les autres, ils ne font absolument rien pour l’animation régulière du centre, qui est pourtant un nid d’emplois pour les jeunes de la localité. Leur silence est coupable et criminel car, occasionne –t-il, la destruction d’un bien culturel.
Au demeurant, il urge de repenser l’organisation de la Maison Internationale de Guèlèdè de Savè. Le Bénin en gagnera aussi bien qu plan touristique qu’économique.
Esckil AGBO

à Cotonou Lobozounkpa, Torri