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Littérature: Le fétichisme dans Le fils du fétiche de David Ananou, de l’obscurantisme à l’ignorance, un danger pour le bien- être social

Dès sa naissance dans les années 20, la littérature négro- africaine s’est vue nourrie de plusieurs tendances. Au nom de celles-ci, le culturalisme qu’a parodié l’écrivain togolais David Ananou dans son roman, le fils du fétiche paru en 1955 et réédité en 1971.

Le fétichisme : c’est le fait culturel africain dénoncé par David Ananou dans son roman Le fils du fétiche. A la lecture du titre de ce roman, on a l’impression que c’est une œuvre portant des propos dithyrambiques à l’endroit des fétiches africains. Loin de là. Il s’agit plutôt d’un véritable réquisitoire dressé contre l’obscurantisme qui alimente le quotidien des féticheurs. Pour la petite histoire, Le fils du fétiche parle de Sodji, habitant d’un village situé dans le Sud du Togo et de son fils Dansou. Le père est un adepte du dieu tonnerre et se marie avec son co-adepte Avlessi après avoir divorcé consécutivement avec ses deux premières épouses. Mais le couple n’eut d’enfant (Dansou) que trois ans plus tard. Ceci après de vaines de recherches de progénitures chez les devins. Le fils quant à lui connut plusieurs épreuves de la vie avant de retrouver la stabilité et la prospérité ensemble avec sa conjointe Afiavi. Dans ce roman, il y a des personnages, qui, face à certaines situations dont ils pouvaient avoir facilement de solutions préfèrent recourir au fétiche. C’est le cas des premières femmes de Sodji, qui voulant dérouter le plan de prendre une troisième épouse de leur mari ont couru voir le féticheur Agossa. Celui-ci leur a remis, contre la maudite somme trois cent FCFA, une poudre noire à mettre dans le repas de l’homme et qui occasionnera la discorde entre Sodji et Avlessi. C’est également l’exemple de ces deux derniers qui, aussitôt après le mariage ont fait recours aux dieux afin d’avoir un enfant. Mais en dépit des nombreux sacrifices faits en l’honneur de ces dieux, c’est par la médecine moderne que le couple a pu avoir gain de cause. Ainsi, à travers ce roman, il est évident que David Ananou a déshabillé la mystification qui caractérise les actes obscurantistes des féticheurs noirs. Il a non seulement ridiculisé leurs pratiques mais il a aussi mis à nu leurs ruses. Aux pages 187- 188, l’auteur exhibe ce comportement des féticheurs via Afo, le charlatan qu’a consulté Aholou. En effet, celui-ci a prêté sa voix aux défunts afin de bleuir son client car, précise David Ananou à la page 188 « il savait être ventriloque en ces heures.» Ce constat fait par l’écrivain du pays de Faure Gnassingbé est très courant aujourd’hui. A la recherche du salut, les populations se confient à tout venant. Il suffit que celui-ci dise qu’il porte la clé du bonheur et il a dans les heures suivantes tout un aréopage d’adeptes. La nouveauté est que le stratagème va au-delà des féticheurs. Chrétiens comme musulmans et mêmes de simples individus sont de pleins pieds dans la ruse. Ils se cachent derrière le nom de Dieu pour gruger les pauvres populations assoiffées du salut. D’autres se font passer pour Dieu et arnaquent soigneusement mais de manière sauvage leurs concitoyens et même les dirigeants avides du pouvoir. Au Bénin, c’est l’épisode ‘’Parfaite de Banamè’’ qui est en vogue. Depuis environ quatre ans, celle qui est désormais appelée ‘’ Daagbo’’, ce qui signifie grand – père en langue fon dans le Sud – Bénin brave l’Eglise Catholique et draine des milliers de citoyens à la quête permanente du mieux- être, du salut. Chapelets, bracelets, bagues, foulards, bougies et bien d’autres objets faits à son effigie sont vendus à chaque occasion à la foule dont le nombre s’accroît quotidiennement. Quelle est la vraie face de tout cela ? En attendant la réponse à cette interrogation, il importe de souligner que l’ouvrage ‘’Le fils du fétiche’’ de David Ananou, malgré son ancienneté constitue un miroir pour la société contemporaine. Ceci en matière de croyance. Ce qui traduit le caractère impérissable de toute œuvre littéraire ou du moins de toute réalisation artistique.

Esckil AGBO

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