Le théâtre béninois a des Hommes. De grands Hommes. Ces derniers lui ont donné un sens, un nom et un prestige. Dans la sous région, le théâtre béninois était l’un des meilleurs sinon le meilleur. Jean – Pierre Guingané, le célèbre théâtrologue burkinabé n’en doutait point.
Au prix de la passion, du sacrifice, ils ont travaillé pour que le théâtre du Bénin existe.
Ils en sont aujourd’hui ses dignitaires et le Festival International de Théâtre du Bénin (FITHEB), son ouvrage tant convoité. Il y a une vingtaine d’années où aller au FITHEB était synonyme d’aller s’abreuver à la source du théâtre africain. La biennale béninoise était si désirée que ne pas y participer s’affichait pour les artistes du théâtre du monde comme une faute professionnelle. L’événement suscitait passion, engouement, challenge… Mais, hélas !
Le Fitheb vaille que vaille s’écroule sous le regard impuissant de ses bâtisseurs. Et les dignitaires du théâtre béninois parmi lesquels Dine Alougbine, Tola Koukouï, Ousmane Alédji, Claude Balogoun, Koffi Gahou, Pascal Wanou, Hermas Gbaguidi, Florisse Adjadohoun, Eliane Chagas, Gaston Eguédji, Bienvenu Koudjo, James Salanon, Marcel Orou Fiko et Eric Hector Hounkpè observent la mort lente du bébé d’il y a 27 ans.
Le dernier est l’actuel directeur de la biennale. Grand Manager et homme dont l’esprit est très créatif, Erick Hector Hounkpè, dès sa prise de service a initié un certain nombre de choses qui (re)promettaient une promotion programmée du festival, aussi bien au plan national qu’à l’international. Sans être exhaustif, nous citons au nombre des innovations « Fitheb migratoire » et « Tous au Fitheb ». La maison Fitheb était régulièrement animée et nous voyions la 14ème édition s’annoncer remarquablement. Hélas !
Désolé ! A moins d’un mois de mars, la biennale est silencieuse. Un mutisme total s’est installé autour de l’organisation de l’événement. Sidéré, sommes- nous. Qu’est- ce qui se passe ?
Le premier qui devrait informer l’opinion publique est bel et bien le directeur Erick Hector Hounkpè. Il a le devoir d’expliquer aux hommes du secteur théâtral ce qui se passe et ce qui s’est passé pour que nous en sommes à ce silence fatal pour le Fitheb 2018. La couche juvénile l’a espéré. La laborieuse presse culturelle du pays s’en est préoccupée. Toujours le silence.
Ce qui nous amène à nous poser des questions.
- Dans le budget du Ministère du tourisme, de la culture et des sports, qu’est- ce qui est prévu pour le Fitheb, l’institution et le Fitheb, la biennale ? L’ancien Ministre Ange N’Koué avait – il anticipé, comme l’aurait souhaité tout artiste, sur le financement du Fitheb 2018 en laissant des prévisions claires à son successeur ? Si rien de tout cela n’a été planifié, il n’y a pas de magie ou de miracle à faire : l’événement reçoit le coup. Quel que soit le pragmatisme de l’actuel ministre de la culture, Oswald Homéky.
- Le Directeur du Fitheb n’est- il pas parvenu à convaincre sa hiérarchie de son plan d’organisation ? Quel est le plan de communication pour vendre la destination BENIN au cours de cette édition ? Quel est le nombre de spectacles nationaux et internationaux et quel est celui des délégations étrangères que le festival entend accueillir ? Quel est le thème de l’édition et quel est son modèle économique ? Nous ne doutons pas de l’esprit préparatif de M. Hounkpè mais tout laisse croire que rien de tout cela n’a été fait. Le cas échéant, il n’est pas à dédouaner.
- Le Conseil d’administration de l’institution, jusque- là a fait quoi ? Quelles sont ses démarches auprès de l’autorité pour que la biennale ait lieu ? Nous ne voyons rien.
- Et les dignitaires du théâtre béninois, au nombre desquels, on retrouve des anciens directeurs du Fitheb, des aspirants au poste de premier responsable de l’institution, ils ont fait quoi et ils font quoi pour que nous ayons notre Fitheb 2018? Comment peut- on construire un bâtiment ou avoir des ambitions de vivre dans une maison qu’on voit s’effondrer et ce sans rien faire ?
Le Fitheb 2018 est victime de l’inaction politique, du silence de son directeur Erick Hector Hounkpè et de la complicité des dignitaires du théâtre béninois.
Comme le phénix, le Fitheb doit renaître de ses cendres, ceci, à travers une restructuration réfléchie et dépourvue de toute subjectivité. Car au-delà des têtes, le Fitheb souffre également de ses textes.
Esckil AGBO