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Cameroun : Il est urgent de créer un marché d’Art Contemporain

Barthélémy Toguo, Vue de l’exposition « Hidden Faces », Galerie Lelong, Paris, 2013 - source/photo: RFI

Depuis quelques décennies, la création de l’art contemporain au Cameroun bénéficie d’une vaste médiatisation et d’une reconnaissance accrue. Mais les galeries restent cependant peu fréquentées et le potentiel d’acheteurs demeure faible.

Coloré, différent, dynamique, exotique, politique, engagé, vivant, vivifiant, surprenant : les épithètes ne manquent pas, dans les médias grand public, pour qualifier l’art contemporain camerounais. Si parfois ces qualificatifs agitent les méninges de quelques puristes sur la validité de ceux –ci, il n’est pas s’en ignorer que ces créations demeurent parfois très inconnues du large public.

Qu’est ce qu’un marché de l’art ? Existe-t- il réellement au Cameroun ? Ce sont des questions pas faciles à débrider auxquelles nous tenterons de répondre vu que le marché de l’art au Cameroun reste encore très embryonnaire.

Marché inexistant
Quand on évoque le marché de l’art, il est intéressant de rappeler qu’il constitue un lieu de rencontre de l’offre et de la demande dans un contexte précis, avec pour objectif affiché, la commercialisation d’objets d’art. Au Cameroun, l’art contemporain essaye tant bien que mal de se frayer un chemin. L’attention accrue dont bénéficient les artistes de ce secteur culturel qu’ils vivent sur place, appartiennent à la diaspora ou passent leur temps dans les avions entre Dakar, Genève, et Paris est le plus souvent portée par de nombreuses initiatives individuelles qui, à leur tour, en suscitent de nouvelles. Aujourd’hui, outre journaux et magazines, des dizaines de « médiateurs » en tout genre tentent de s’intéresser à ce marché. Mais que dire au niveau local ?

Galeristes, commissaires d’expositions, journalistes, critiques, collectionneurs, amateurs, marchands toute cette faune emmène à créer un marché de l’art, lequel tout constat fait, n’existe pas au Cameroun.

Alioum Moussa, artiste peintre performeur camerounais explique ici : « le marché de l’art objectivement n’existe pas au Cameroun. Les maillons qui constituent la chaine ouvrière de ce secteur à savoir, galeristes, marchands, collectionneurs sont introuvables dans notre milieu. »

Ténacité
La grande majorité des artistes au Cameroun sont des peintres ou des sculpteurs, un mélange où peintures, et sculptures s’échangent selon des codes particuliers. Pour certains tenaces, le plus souvent, ils vendent aux expatriés, dans des espaces spécialisées ou à certaines élites africaines installées dans le pays. Pour la plupart, les ventes se font dans l’informel. « Je fixe mes prix en fonction de plusieurs variétés allant du format aux techniques de disciplines. Je vends rarement au Cameroun, la plupart des collectionneurs qui me contactent le font à travers le net, et parfois via quelques expositions à l’étranger. » Indique encore Alioum Moussa.

Pour avoir un marché de l’art dynamique au Cameroun, il faut y intégrer le volet formation. Fondamental pour un marché efficient. « Il faut faire quelque chose et très vite. Créer des masters dans le domaine, de l’art. Tout commence par là », explique son collègue Barthélemy Teguo.

Parfois, faute de combattants dynamiques du côté des institutions publiques, les artistes et autres acteurs privés camerounais prennent sur eux de s’ériger en passerelles pour la diffusion de ces arts. C’est le cas de Bandjoun Station et du centre d’art contemporain Doual’art de Marylin Schaub installé dans la capitale économique camerounaise.

Lire l’intégralité de l’avis de Barthélémy Toguo sur le sujet

Barthélemy Toguo, Fondateur de Bandjoun Station, artiste plasticien sculpteur, performeur Camerounais. Photo Yves Bernard

Barthélemy Toguo, Fondateur de Bandjoun Station, artiste plasticien sculpteur, performeur Camerounais. Photo Yves Bernard

Existe-t-il réellement un marché de l’art au Cameroun ?
Pour être sincère il n’existe pas un marché de l’art contemporain au Cameroun. Si on peut dire, il existe juste une seule Galerie d’art contemporain, la Galerie MAM à Douala, avec une seule galerie on ne peut pas parler d’un marché de l’art, pas de foire, un marché de l’art est un tout.

Comment vendez- vous donc vos œuvres au niveau local ?
Au niveau local, il n’y a pas de Camerounais qui achètent mes œuvres, car je n’ai pas de galeries qui me représente ici, Je n’ai aucun agent au niveau local qui sert de commercial pour proposer mes œuvres, pas de « art adviser », pour mettre en relation l’artiste et l’acheteur afin que les œuvres soient visibles. En clair, je ne vends rien au Cameroun, dans mon cas précis, aucun collectionneur n’a encore acquis mon travail au Cameroun, mon marché est à l’extérieur, c’est dommage.

Que faut-il donc faire pour avoir un marché local de l’art au pays ?
Il faut commencer par la formation. Il faut créer un environnement pour mettre l’art en exergue. Il y a quelques jours, j’ai rencontré le Recteur de l’université de Dschang le Professeur Tsafack Nanfosso , à qui je dois soumettre un projet de création d’une filière master professionnel en « Patrimoine Tourisme culturel », et un autre en « Management projet culturel et digital », afin que la jeunesse soit mieux outillée pour affronter le domaine de l’art. Il faut former de futurs jeunes galeristes, agents d’artistes, commissaires des expositions, encadreurs d’arts, historiens de l’art… etc… La formation est primordiale, et l’état doit soutenir la création d’une foire d’art contemporain, il a aussi un rôle à jouer.

A quand une exposition de Barthélemy Toguo?
Depuis 2010, le musée National du Cameroun devrait réaliser une exposition nommée Cissé/ Toguo qui avait eu lieu à la biennale de Dakar de la même année. Le Cameroun devrait récupérer cette exposition pour le public camerounais. Cette exposition n’a jamais eu lieu pour « faute d’espace » approprié, je déplore cette triste situation dans mon pays.

J’ai un parcours de 30 années de carrière avec des expositions partout dans le monde, mais je n’ai jamais eu une exposition digne au Cameroun. Même si Bandjoun Station a une des meilleurs espaces d’expositions au Cameroun et répond aux critères internationaux, je ne pense pas qu’il serait logique aujourd’hui de faire cette rétrospective là bas car ce n’est pas son objectif.

Réalisation : Edithe Valerie Nguekam, Correspondante / Cameroun

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