« Je crois au cinéma Africain mais il faut d’abord que ce soit un cinéma d’intégration. »

ARANTESS II BONALII,

Né le 12 Décembre 1970 à Man, la capitale de l’ouest de la Côte d’Ivoire, ADAMA COULIBALY, connu sous le nom de ARANTESS DE BONALII se donne le pari de corriger le prisme déformant des regards extérieurs sur le cinéma africain. « Nafi », « Un mari pour deux sœurs » ou encore « l’histoire d’une vie », ce talentueux réalisateur a déjà fait ses preuves et entend poursuivre sur cette lancée. Au Bénin pour le tournage de la 2ème partie de son film « La saga des héritiers » qui passe actuellement sur la télévision nationale béninoise, Dekartcom a eu un entretien avec lui. De son parcours, à ses projets en passant par sa vision du cinéma Africain, le cinéaste de renom se confie à votre site………

ITW : Carolle Adriana / Dekartcom – Cotonou

Dekartcom :Vos débuts dans le cinéma
Arantess II Bonalii : Je me suis laissé fasciner par les images de la télévision dans les années 70. La côte d’Ivoire était dans la deuxième décennie des images sur nos petits-écrans. Nous étions enfant et nous nous sommes dit que nous pouvions faire notre propre cinéma. On a commencé à découper du carton, on mettait la torche derrière les plastiques devant et on utilisait nos doigts pour faire des images puis on les commentait et on faisait payer les autres enfants avec un bonbon pour venir regarder les films. Donc, quand je n’étais pas à l’école, je découpais le carton. Et j’en voulais même à mon père quand il achetait des choses qui ne venaient pas avec du carton.

Dekartcom :Votre premier film………
Arantess II Bonalii : Mon premier film, je l’ai fait en 1995 et c’était un court métrage. J’avais appris qu’un concours international de court métrage qu’on appelle CLAP IVOIRE était lancé. J’ai été informé à midi et à 14h j’ai fait mon tournage. A 18h j’étais au montage et à 20h nous avions fini de monter. Le lendemain je suis allé déposer. C’était clos mais ils ont accepté. Et j’ai été finalement le lauréat de cette première édition de Clap Ivoire.

Dekartcom : Vous avez suivi auparavant une formation dans une école de cinéma ?
Arantess II Bonalii : J’ai fait trois ans de formation aux métiers du cinéma spécialité réalisation avec une licence appliquée et après une maîtrise en esthétisme audiovisuel. Je suis aussi administrateur en média et journaliste reporter d’images et surtout reportages de guerres.
Dekartcom :vous en êtes à combien de films aujourd’hui ?
Arantess de Bonalii :En éliminant les commandes et en tenant compte des productions signées par ma structure ces cinq dernières années, en long-métrage je suis à 16 films et pour les feuilletons je suis à 12.

Dekartcom : Les plus célèbres de vos réalisations…………………..
Arantess II Bonalii : Je vais en citer deux qui ont été connus au Bénin. Il s’agit de squatters et exil intérieur qui sont sortis à l’occasion de la Saint valentin. Pour les feuilletons, il y a Nafi, l’histoire d’une vie et la saga des héritiers qui passe actuellement sur l’ORTB.

Dekartcom : parlez nous du cinéma ivoirien…………….
Arantess II Bonalii : Du fait que dans la création, il n’y a pas de frontières, on ne peut pas parler de l’évolution du cinéma ivoirien sans regarder le Bénin et tous les autres pays francophones. La plupart de nos cinéastes ont été formés en France où on a toujours mis en valeur le cinéma d’auteur qui privilégie l’empreinte du réalisateur à l’aspect commercial du film. Donc, on a un cinéma qui n’est pas commercial et tant que c’est le cas il serait difficile que le cinéaste puisse vendre son film et avoir les moyens nécessaires pour continuer de produire. Donc à l’étape numérique du cinéma Africain, il y a plus de productions mais celles-ci doivent apprendre à s’adapter aux besoins du public. Le public se tourne vers les productions étrangères parce que nous produisons ce qui nous intéresse nous et pas ce qui intéresse le public.

Dekartcom : En tant que réalisateur que préconisez-vous pour remédier à cela ?
Arantess II Bonalii : Il faut de la formation, de l’orientation pour rendre noirs nos écrans c’est-à-dire mettre en avant les productions de chez nous. Et laisser à côté les films brésiliens, hindous qui inondent nos télévisions. Et il faut qu’on apprenne à rendre incontournable nos productions et que nos télévisions acceptent de prendre aisément les productions faites par nous chez nous.

Dekartcom : Justement vous sortez bientôt un livre sur l’économie du cinéma…………………………
Arantess II Bonalii : Oui. Ce livre donne toutes les étapes de commercialisation d’un film qui commence déjà depuis l’idée. Il parle de prendre des sujets qu’on n’aurait pas du mal à vendre, de s’intéresser aux aspects du film qu’on peut vendre, aux droits d’asile qu’on peut créer, de développer depuis le tournage l’aspect promotionnel du film parce que en Afrique on sait produire mais on ne sait pas vendre. Il faut créer le buzz autour du film en communiquant. Un produit peut vivre sans publicité mais pas sans communication.

Dekartcom : Vous êtes actuellement au Bénin pour le tournage de la deuxième partie du film « la saga des héritiers », pourquoi avez choisi ce pays ?
Arantess II Bonalii : Ces trois dernières années, beaucoup de mes films ont été diffusés au Bénin et je ne veux pas produire des films ailleurs et venir les imposer au public béninois. J’ai voulu impliquer le Bénin par la présence de ses acteurs et de ses techniciens dans ce feuilleton de 104 épisodes qui parle de la politique et de ses coups bas. Je crois à l’intégration et le cinéma n’a pas de frontières.

Dekartcom : Le travail avec les Béninois…………………………….
Arantess II Bonalii : Il y a un échange d’expertises. Je gagne en même temps qu’eux. Et en sortant de mon plateau ils peuvent estimer être au niveau d’une production internationale.

Dekartcom :Vous dirigez une structure en Côte d’Ivoire……………
Arantess II Bonalii : J’ai une structure depuis 2006 qui s’appelle AC MEDIA qui a ensuite changé de dénomination pour s’appeler BONALII STRATEGY. C’est une structure spécialisée dans le domaine de Communication dont la palette des activités s’étend à 5 départements Box Offices Studios, Time Tv, 12 Entertainment, initial digital solutions et Akili.

Dekartcom : Vos distinctions…………
Arantess II Bonalii : C’est l’une des choses dont je n’aime pas parler. Je fais du cinéma pour vendre et non pour avoir des prix. J’ai eu des prix en côte d’ivoire et ailleurs sur le continent mais je répète que ce n’est pas mon objectif.

Dekartcom : Vos projets………
Arantess II Bonalii : Bien sûr, au niveau de ma structure nous avons beaucoup de projets. Je peux déjà vous parler de la construction des ciné multiplex, des salles de cinéma de 20, 50, 100 places dotés de dispositif de projection 3D numérique, en Côte d’Ivoire et dans les pays de l’UEMOA. Nous prévoyons aussi des studios de silicone valley, de vrais laboratoires de cinéma, une école de cinéma et surtout le ciné-city. Il faut des infrastructures autour du cinéma et c’est ce à quoi nous nous attelons.

Dekartcom : Vous lancez le 22 septembre prochain un évènement. De quoi s’agit-il ?
Arantess II Bonalii : C’est le GPACT: le Grand Prix Africain du Cinéma de la Télévision et des Tic. Ce festival annuel autour de films africains commerciaux vise à rendre incontournable les productions Africaines. Après ça, il y a aussi la semaine ARANTESS, Festival du cinéma romantique. L’événement concentré vers l’horizon international, permettra des rencontres entre les réalisateurs africains et le public à travers des séminaires, la découverte de filmographie et d’œuvres cinématographiques exceptionnelles, un regard sur la production de l’année, en vue de la célébration du cinéma Noir.

Dekartcom : Pour conclure……………
Arantess II Bonalii : Je crois au cinéma Africain mais il faut d’abord que ce soit un cinéma d’intégration. C’est vrai qu’il n’y a pas de cinéma Africain mais de cinéma fait par les Africains. C’est donc aux cinéastes africains de donner notre empreinte dans nos manières de transcrire nos histoires. Pour cela, Il faut la formation. Et aussi que nos Etats arrêtent d’aider les cinéastes parce que l’aide à la production pousse les cinéastes à ne pas chercher à commercialiser leurs films mais juste à présenter un résultat.