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Covid-19 et les Arts : « Si cela pouvait être un mal pour un bien, la finalité serait glorieuse…» dixit Laetitia Normand

Laetitia Normand, Manager d'artistes, bookeuse,community manager et formatrice "Rêve Africain". Ph/ Kolawolé Atcho

La crise sanitaire mondiale liée à la pandémie du Covid-19 n’épargne aucun secteur. Les arts et culture en souffrent. Chaque acteur de la chaîne artistique et culturelle la vit à sa manière. Dans une série d’interview, nous leur donnons la parole à travers le monde. Dans cette publication, nous vous proposons les analyses suivies de propositions de Laetitia Normand, de l’initiative du Rêve Africain et de son Afro Pépites Show. «Un projet chercheur de talents sur internet ». La manager d’artistes émergents rapporte des expériences de résilience à la crise et porte son regard sur ces initiatives. Plus loin, elle dit comment elle aperçoit la passerelle vers la reprise d’une vie ‘’normale’’ dans le secteur des arts et de la culture après la crise. Une crise qui ne serait pas si négative pour l’avenir du secteur, à l’en croire. Il vaut mieux même accepter que les temps soient durs pour trouver des pistes à long terme.

Aucun secteur n’a échappé au covid-19. Quels sont les impacts sur les arts et la culture ?
L’impact est mondial et très préoccupant, perturbant et intrigant. Cette pandémie touche gravement tous les corps de métiers et amène à une grande réflexion et à beaucoup de questions… Qu’en sera-t-il demain ? Je n’en sais pas grand-chose, je ne peux qu’espérer qu’on trouve le bon équilibre et participer à la réflexion ! J’espère que les artistes émergents ne souffriront pas plus qu’ils souffrent déjà. Je ne l’imagine même pas ! Ce serait la fin de l’émergence culturelle… et pourtant…. J’ai bien peur qu’il y ait un gros ralentissement pour eux. J’espère que tout le monde ne va pas (être obligé de) gonfler ses prix pour rattraper le manque à gagner ! Je pense notamment aux interlocuteurs qui gravitent et profitent aussi des actions culturelles (Transporteur / Hôteliers / Restaurateurs / matériels techniques…) et par conséquent j’espère que les organisateurs ne baisseront pas les cachets proposés aux artistes émergents pour payer ce manque à gagner. Je me fais moins de soucis pour les Stars qui elles se gargarisaient déjà au détriment de l’émergence culturelle.

Que proposez-vous comme alternatif dans le secteur en attendant que la crise ne passe ?
Avant même cet état sanitaire la culture souffrait, comme d’autres corps de métiers. Il va falloir passer la transition. C’est très complexe mais j’espère que tout le monde sera raisonnable et solidaire. Pour le moment, seuls ceux qui ont monétisés leurs arts sur internet gagnent encore un peu d’argent : streaming, boutiques en ligne, les réseaux. Mais ça ne suffit pas. Il va falloir se réinventer pour passer cette transition. En attendant, pour ne pas perdre de temps, la solution sûre est d’en profiter pour monétiser et installer son activité sur internet (Site internet, boutique en ligne, streaming..), développer son réseau… et cela est valable pour tous les corps de métiers. C’est un investissement qui paiera demain. J’ai vu des initiatives naître, live à la maison… Mais c’est vraiment par dépit, car l’art se partage de prêt et se rémunère. J’ai vu que certains réseaux s’attelaient à mettre en place des lives streaming payants, mais je ne suis pas sûre de l’impact financier dans ce contexte où tout le monde se demande comment cela sera demain. J’ai aussi vu des pays où les festivaliers vont voir des concerts en voiture. Bon, ça perd tout son charme. Difficile de danser dans sa voiture, puis aller à un concert c’est aussi revoir ses amis et créer des liens sociaux… J’avoue que les solutions sont maigres pour le moment et pas très réjouissantes.

Juste après les déconfinements, la crise en général, qu’est se passera-t-il probablement en termes de vie des projets? Un cafouillage ?
Ah oui ça va être chaud… mais la nature humaine finit toujours pas s’adapter et se réinventer. C’est un bon exercice de réflexion et aussi le moment de redonner de la valeur à la culture et à tous les maillons de la chaine, sans laquelle on se meurt…

Comment les acteurs culturels pourront se préparer pour bien traverser ce temps de transition vers la reprise normale des activités dans le secteur ?
En bien, il va falloir être patient et courageux. Je le crains ! Mais c’est un temps pour conceptualiser des projets et se préparer à les mettre en œuvre dès le déconfinement.

Covid-19 a surpris le monde entier. Est-ce possible de trouver des approches pour ne pas trop souffrir face à d’éventuelles situations pareilles. On ne le souhaite pas, certes.
La vie n’est pas un long fleuve tranquille. C’est une catastrophe, donc la seule approche pour ne pas souffrir est d’accepter que les temps soient durs et de réfléchir ensemble à comment s’en sortir. Il faut faire marcher nos cerveaux comme à chaque fois qu’on rencontre des difficultés. Dans le milieu culturel on est déjà habitué à cet exercice, donc on devrait pouvoir rebondir, si ça ne dure pas trop longtemps bien sûr. L’état a un rôle aussi très important. Il y a la santé économique des citoyens mais il y a aussi la santé mentale d’un peuple et ça passe par la culture et les événements ! On le sait, ce n’est plus à prouver. La culture, sur nos vies sociales et affectives, joue un rôle primordial. La plupart des états l’occultent, mais la vie affective est tout aussi importante que la vie professionnelle. La dimension sociale passe par la culture et est vitale pour créer ou recréer des liens. L’équation est simple : Plus d’événements = Solitude et solitude = troubles psychologiques, suicides, perversions et manques affectif. Donc oui on espère vivement que les états ne laisseront pas mourir la santé morale et sociale de leurs concitoyens en finançant considérablement la culture. J’espère aussi que cet événement fera de la culture un maillon indispensable à soutenir et à valoriser dans le schéma économique des états. Donc, si cela pouvait être un mal pour un bien, la finalité serait glorieuse…

 

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