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Prime Ezinsè / Jongleur : « Au Bénin, s’ouvre une école de cirque »

CircoBénin, Photo/DR

Comptable de formation, Prime Ezinsè n’a pas pu continuer ce métier qu’il exerçait déjà dans une Institution internationale au profit de sa passion pour les arts du cirque. C’est une passion qu’il a découverte dès le bas âge et qu’il s’attèle à améliorer au jour le jour. Après sa participation à de nombreux festivals de cirque un peu partout dans le monde et l’obtention de plusieurs diplômes dans les disciplines du cirque, l’homme préside aujourd’hui l’Association des jongleurs d’Afrique. De même entend-il partager son savoir faire en créant « CircoBénin », une école de cirque prévue pour démarrer dès septembre au Bénin. Dans une interview que l’artiste originaire d’Agonlin nous a accordée dans la matinée du jeudi 9 août 2018 dans les locaux de DEKartcom à Cotonou, il met la lumière sur son riche parcours et ses ambitions pour le rayonnement des arts du cirque au Bénin.

Dekartcom.net : Prime Ezinsè, vous êtes artiste jongleur et président de l’Association des jongleurs d’Afrique. Alors dites-nous comment êtes-vous arrivé au cirque ?
Prime Ezinsè : J’avais la passion pour le cirque dès le bas âge. J’ai même démissionné de mon boulot pour me consacrer entièrement à cet art. J’étais comptable de formation et je travaillais déjà dans une Institution internationale. Quand je démissionnais, mes collègues m’ont demandé ce qui n’allait pas. Mais aujourd’hui je n’ai pas encore regretté parce que je savais ce que je voulais et j’avais la ferme conviction d’y arriver avec les moyens que je me suis donné en payant mes billets d’avions et mes formations en Europe.

C’est l’occasion pour moi de remercier, mon épouse, ma famille, la famille Le GOAZIOU et mes amis pour leur soutien. L’Unicef et le Serious Road Trip m’ont proposé par la suite, pour des projets humanitaires dans le milieu du cirque social d’aller travailler en Syrie et en Turquie avec des enfants qui ont connu la guerre. C’est comme cela que j’ai évolué. Il faut dire qu’au début je m’étais vraiment donné les moyens pour atteindre mes objectifs.

Comment en êtes- vous arrivé à décrocher des diplômes à l’international?
C’est suffisamment cadré. J’ai d’abord fait un Brevet de Secourisme qui est le premier diplôme car pour évoluer dans le domaine du cirque, il est nécessaire de savoir secourir en cas d’accident. Maintenant quand vous êtes artiste professionnel, il y a un cursus à suivre, qui est différent de celui qui aspire à être formateur. Et là, le premier niveau, c’est le Brevet d’initiateur des arts du cirque (Biac), ce que j’ai fait et qui me permet aujourd’hui d’enseigner dans une école agréée et/ou fédérée à la Fédération Française des Ecoles de Cirque.

Ensuite il y a les diplômes comme le Brevet des techniques du cirque (Batc), le Brevet d’initiation spécialisé des arts du cirque (Bisac), le Brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport (Bpjeps) et le Diplôme d’Etat (DE) d’Enseignement des arts du cirque.

Prime Ezinsè, jongleur, président de l’Association des jongleurs d’Afrique et fondateur de l’école de cirque « CircoBénin ». Ph/DR

Vous envisagez mettre votre expertise au service de la jeunesse béninoise en créant une école de cirque dénommée CircoBénin. Mais avant, dites-nous, qu’est – ce qu’on peut apprendre dans une école de cirque ?
Alors aujourd’hui les disciplines qui sont enseignées dans une école de cirque moderne sont les aériens, l’acrobatie, la jonglerie et l’équilibre sur objet. Dans chacune de ces rubriques, il y a des sous rubriques.

CircoBénin, qui ouvre ses portes dès septembre prochain, comment les cours vont se passer ?
A Circo Bénin, dès la prochaine rentée, nous aurons toutes les disciplines sus-citées sauf les aériens, car nous ne disposons pas encore des agrès pour développer ces ateliers. Cela viendra pour la rentrée 2019 – 2020. Soulignons que notre école de cirque à trois volets que sont la Pédagogie, le social et la diffusion de spectacle.

Nous mettrons à la disposition de nos apprenants des documents qu’ils pourront consulter et du matériel qu’ils pourront également toucher.

Avez-vous déjà sollicité des professionnels pour l’enseignement de ces différentes disciplines ?
Oui. Pour cette première rentrée, je serai le seul formateur, mais je me ferai assister par deux stagiaires que l’école va inscrire pour le cursus de formateur dès l’été 2019. Nous aurons aussi deux formateurs qui viendront de Paris se joindre à nous au cours de l’année. Nous avons commencé déjà les démarches.

La formation que donnera cette école sera-t-elle diplômante?
Alors c’est beaucoup plus des ateliers qui pour le moment ne seront pas validés en fin d’année, mais avec des objectifs à atteindre à la fin de chaque année et qui évoluent selon le niveau technique de l’enfant. Les enfants vont juste présenter une restitution pour montrer aux parents ce qu’ils ont appris au cours de l’année.

Nous sommes en train de négocier un partenariat avec la ville de Rosny sous-bois en France qui, a une école nationale de cirque. Le maire est déjà venu ici au Bénin et ensemble on a tenu une séance de travail. Je me suis également rendu là-bas en juillet passé pour le même exercice avec le directeur et le personnel administratif de l’école nationale de cirque à Rosny sous-bois. Nous avons jusqu’en décembre prochain pour nous entendre sur les conditions sur lesquelles nous travaillerons à partir de la rentrée de septembre 2019. Ceci permettra aux jeunes qui veulent suivre un cursus professionnel de continuer.

Qui sont ceux qui peuvent s’inscrire à CircoBénin ?
Déjà à partir de 4ans vous pouvez vous inscrire à CircoBénin. C’est 5 classes divisées par tranches d’âges. Donc on aura une classe pour les enfants qui ont entre 4 et 6 ans. Une seconde classe pour les enfants de 7 à 9ans, une troisième pour ceux de 10 à 14ans. Une quatrième classe pour des jeunes de 15 à 18ans puis la dernière classe sera consacrée aux apprenants de 19ans et plus. Nous invitons les parents à vite inscrire leurs enfants car certains pourront bénéficier d’une bourse après études de dossiers.

A vous entendre, nous comprenons que le secteur du cirque est bien orgaisé. Doit-on comprendre que cette discipline n’existe pas que pour distraire?
Le cirque n’est pas que pour s’amuser. C’est une activité très complète qui permet à chacun de s’épanouir mais aussi qui permet d’affronter des défis. Le cirque développe la concentration, la conscience corporelle, l’habileté, la prise de décision, l’estime de soi, la confiance en soi, l’agilité, l’équilibre et la coordination, pour ne citer que ceux-là…

Mais lorsqu’on parle de cirque on pense, le plus souvent aux Etats – Unis et à certains pays de l’Europe. Il y a des disciplines du cirque qui prennent part aux jeux olympiques. Mais au Bénin on ne voit pas grand-chose. Est-ce que vous avez l’impression que les gens connaissent le cirque dans votre pays d’origine ?
Alors cela fait des années qu’on a commencé par mener des actions. Moi j’avais intégré le groupe des « Supers acrobates de Cotonou » en 2002. Nous, nous avons appris le cirque dans la rue. Aujourd’hui moi j’ai formalisé mes connaissances. On a beaucoup suivi ce qui se passe à la télé, on a téléchargé beaucoup de tutoriels et je vous promets que les jeunes ont un très bon niveau.

Mais malgré le nombre de spectacles et d’actions menées, on remarque que les gens ne connaissent le cirque que par ‘’le plus grand cabaret du monde’’, ‘’le cirque du soleil’’ et autres mais le cirque ne s’arrête pas que là. Il y a beaucoup d’autres choses qui sont derrière.

Dites-nous, de manière institutionnelle le cirque existe-t-il au Bénin ?
Il faut reconnaitre que le cirque n’est pas assez connu au Bénin alors que pour une fédération, il faut plusieurs associations. Il n’y a que « Les supers acrobates » et « Le cirque Tokpa » que j’ai dirigé de 2011 à l’année dernière comme troupe de cirque. Donc on n’est pas assez nombreux pour fédérer des choses. Mais le ministère est informé de nos activités au jour le jour et il se joigne à nous parfois. Par exemple pour la ‘’convention africaine de Jonglerie’’ qu’on avait organisée l’année dernière, le ministère de la culture et des sports s’était impliqué. On en fera de même pour la deuxième édition. Je pense que petit à petit on va y arriver.

Que faites-vous à votre niveau pour amener les populations à s’intéresser l’art du cirque ?
J’ai dans mon programme un projet qu’on appelle « éclosion des arts du cirque ». C’est un programme qui va se dérouler un peu partout dans le Bénin. Les formateurs iront sur place pour donner des ateliers, de petits spectacles dans les rues pour inciter les jeunes à s’intéresser aux arts du cirque. Ainsi nous pourrons commencer à donner des ateliers à ceux qui le désirent. J’ai la ferme conviction que cela va évoluer parce que je discute beaucoup avec les collègues qui font du cirque ici au Bénin et ensemble, je pense que nous y arriverons.

Parlons du cirque et de son organisation, il y a le Bénin qui accueille en novembre prochain la deuxième convention de jonglerie. Dites-nous de quoi s’agit-il concrètement ?
Effectivement en novembre prochain on accueille la seconde convention de jonglerie. Une convention est un regroupement des gens qui mènent les mêmes activités dans un même environnement sur une période bien déterminée pour partager entre eux leurs connaissances.

La convention africaine de jonglerie rassemble donc les jongleurs du monde dans un pays d’Afrique. Ils participent à des ateliers, des formations et donnent de beaux spectacles au public au cours de la période.

Je prends l’exemple de « European juggler association » qui a déjà organisé 43 conventions. Alors on va dire que les gens sont fatigués de faire le tour de l’Europe. Ils ont envie d’aller découvrir autre chose, ils ont envie d’aller ailleurs. Le « International jugglers association » a déjà organisé 73 voire 74 conventions et ils ont envie de voir autre chose. Nous, nous n’en sommes qu’à notre deuxième édition. Je pense que l’Afrique est maintenant sous les feux de la rampe en ce qui concerne les arts du cirque.

Le Bénin a-t-il déjà accueilli une convention ?
Oui. Le Bénin comme pays initiateur a déjà accueilli la première convention qui s’était bien passée d’ailleurs. Là, on organise la deuxième parce que comme c’est le début, il faut qu’on montre aux autres pays africains comment cela se passe avant de les laisser faire leur propre expérience.

Dites-nous, qu’est-ce qui se passe au cours d’une convention de cirque ?
Au cours d’une convention de cirque, il y a plusieurs activités. Déjà la parade qui démarre, annonce l’événement. Tous les jongleurs se mettent d’un point à un autre avec des objets et ils se déplacent d’un point à un autre. Il y a ce qu’on appelle des « Workshops » qui sont des ateliers de formation. Les professionnels donnent des formations à ceux qui sont là et ont envie de participer.

Vous pouvez être ‘’conventioniste’’ et donner aussi des ateliers. C’est-à-dire que si je suis bien en jonglerie, je peux suivre des ateliers d’acrobaties et aller donner aussi des formations de jonglerie à côté. Tout le monde participe de ce fait aux ateliers. Il y a le « gala » qui est le grand spectacle de clôture.

Cette année on accueille une autre grosse activité. Il s’agit de la Régionale de l’IJA qui est l’association internationale des jongleurs. Ils organisent par région des compétitions et comme l’Afrique n’organisait pas de convention, nous n’avions encore jamais accueilli de compétitions. Donc après la première convention qui s’est déroulée avec succès, on nous a choisi pour accueillir la Régionale le 21 novembre sur la convention de cette année qui va se dérouler à l’Institut français de Cotonou. Les trois premiers de cette compétition seront primés. Le premier recevra une enveloppe de 300 dollars, le deuxième de 200 dollars puis le troisième de 100 dollars. Ces trois premiers représenteront l’Afrique au niveau international aux USA au même titre que ceux de l’Asie et de l’Europe.

En dehors de l’Institut français, y –t-il d’autres espaces prévus pour accueillir des activités de cette convention ?
Bien sûr. A part la parade dans la rue, on aura des scènes ouvertes qui vont se dérouler dans des lieux publics qui pour le moment n’ont pas encore été sélectionnés. Mais le site officiel de la convention est le centre Olympique Paraïzo. Il va accueillir les ‘’conventionnistes’’ et servira également de cadre pour les ateliers de formation.

Un mot pour conclure cet entretien
Nous profitons de l’occasion pour dire merci au gouvernement à travers le ministère de la jeunesse et les exhortons à plus se pencher sur cette nouvelle discipline qui est en train de s’éclore au Bénin. Aussi, demandons-nous aux promoteurs d’école, d’entreprises et d’évènementiels, de ne pas hésiter à entrer en collaboration avec nous. Nous sommes convaincus que nous ferons beaucoup ensemble.

Réalisation : Inès FELIHO / © Dekartcom _ Aout 2018

Programme du Mois de la Culture Béninoise à Lomé

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