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Porto- Novo_ Nouveau siège du parlement : Une tragédie patrimoniale au bord de la berge lagunaire

Nouveau siège du parlement

Plusieurs sites patrimoniaux ont été détruits au démarrage des travaux de construction du nouveau siège de l’Assemblée nationale à Porto- Novo. Des biens publics et ou naturels ont été emportés par l’édifice parlementaire, occasionnant une débâcle culturelle. Le groupe Arts Challenge et Développement (ACD) s’y est intéressé. En partenariat avec la plateforme www.dekartcom.net, il vous livre le fruit de ses enquêtes.

Dans la « Synthèse de validation de l’inventaire des patrimoines » de la capitale, exercice 2001, le patrimoine culturel de la ville de Porto-Novo est défini comme : « l’ensemble de biens matériels et/ou immatériels hérités du mélange de cultures et de traditions ayant influencé le développement de la ville dans le temps et dans l’espace, qui sont devenus constitutifs de son identité et méritent d’être transmis aux générations futures ». Selon ce document, disponible à l’Ecole du Patrimoine Africain (EPA), 597 éléments patrimoniaux ont été inventoriés lors de l’opération. Ceux- ci sont constitués de six patrimoines royaux, 18 lignagers, 401 afro- brésiliens, 110 coloniaux, 45 paysagers et 17 religieux. Au cours de cet inventaire, sept types de patrimoines ont été déchiffrés: le royal, le lignager, l’afro-brésilien, le colonial, le paysager, le religieux et l’archéologique.

Bien qu’étant des pôles de richesse pour la ville, ces différents biens subissent quotidiennement des actes de destruction ou ils sont parfois simplement saccagés au nom de l’urbanisation.

Au moins trois biens culturels détruits sur la berge lagunaire
Dans sa politique d’urbanisation, le gouvernement béninois a décidé de mettre à la disposition de l’institution parlementaire un nouveau siège. L’emplacement estimé adéquat est situé à l’entrée de la ville, sur la berge lagunaire.

le Professeur d’Histoire d’Art Didier Houénoudé

le Professeur d’Histoire d’Art Didier Houénoudé

Sur le site, existaient bien avant la gestation de ce projet nombre de biens culturels. Aujourd’hui trois, au moins, n’y ont plus de trace.

Il s’agit, selon le Professeur d’Histoire d’Art Didier Houénoudé, du site des esclaves, d’un village de pêcheurs et d’un espace/ temple pour le rituel Gozin (une cérémonie royale qui se déroule tous les dix ans).

De nombreux sites importants culturels et cultuels, explique le Prof, longeaient la lagune. Ils sont porteurs de valeurs historique, rituelle, religieuse et sociologique, a-t-il ajouté avant d’indiquer à titre illustratif le caractère divinatoire de la cérémonie Gozin.

Détruire donc ces biens au nom d’une quelconque urbanisation est un tort infligé à la société. C’est un crime, regrette le Prof Houénoudé, « contre nos patrimoines. » Car, selon lui, la destruction d’un bien culturel n’est pas sans conséquences sur la localité l’abritant.

Destruction de biens culturels : une perte de repère
Quand on laisse disparaître un bien culturel ou quand, délibérément, on le détruit, on participe à la suppression d’une partie de l’histoire.

La berge lagunaire de Porto- Novo

La berge lagunaire de Porto- Novo

« Les pratiques disparaissent emportant certaines valeurs. L’histoire ne se fonde sur rien parce qu’on a détruit le passé et la jeune génération se retrouve dans une perte de repère » signale l’Historien d’art. Au niveau des enfants, poursuit-t-il, « il y a la disparition des jeux de société, fragilisant, par conséquent les structures sociales ».

En ce qui concerne les destructions enregistrées sur la lagune de la ville aux trois noms (Porto- Novo, Hogbonou, Adjatchè), elles sont assimilables à un génocide culturel. Hormis le site des esclaves, les deux autres cas à savoir le village de pêcheur et le temple du rituel Gozin sont, à priori, à finalité religieuse ou du moins spirituelle.

« Qui dit pêcheur parle intrinsèquement de rituel, notamment sur l’eau ». Ne pas le faire pourrait donc occasionner de conséquences fâcheuses sur la société. L’accident lagunaire du jeudi 30 juin 2013 dans la capitale pourrait bien justifier cette hypothèse.

Au regard de tout cela, il est important de susciter auprès des autorités locales de la ville une véritable politique d’entretien et de sauvegarde des autres biens non encore touchés par l’urbanisation. A côté de cela, la population doit être sensibilisée sur les atouts touristiques par ricochet économiques des biens patrimoniaux.

« La « modernisation », le souci d’agrandissement et l’implantation de nouveaux immeubles pour les services publics » ne devraient pas être « les causes premières de destruction du patrimoine ».

On peut se moderniser sans abîmer ni détruire le patrimoine.

Esckil AGBO

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