Festival Téni- Tédji : La 5ème édition démarre malgré les obstructions
23 octobre 2014
Une quarantaine d’années après sa création : La bibliothèque nationale du Bénin végète dans une décrépitude grandissante
25 octobre 2014

Le hiatus de Sophie Adonon : Entre enseignement et dénonciation de la sorcellerie

Quand on finit de parcourir les cent cinquante-deux  (152) pages  du dernier livre intitulé Le hiatus de  la romancière béninoise Sophie Adonon, parue en juillet  2014 aux éditions Edilivre  en France, on se pose deux questions. L’auteure dénonce-t-elle la sorcellerie  ou  l’enseigne –t-elle ?  D’abord le mot hiatus, l’intitulé du roman, relève de la métaphore.  Le hiatus est une figure signifiant un groupe de deux voyelles ou de deux éléments vocaliques contigus, situé à l’intérieur d’un mot ou à la finale d’un mot et à l’initiale du mot qui suit, qui est prononcé séparément.

Il désigne ici « les rapports humains intangibles dans le cas de figure où ce lien se trouve vicié par la sorcellerie ». Dans le livre, Sophie Adonon a  donc abordé la sorcellerie,  une réalité  qui sévit en permanence  en Afrique et singulièrement au Bénin.  Elle emmène son lecteur, à travers des mots bien sélectionnés prenant corps  dans des phrases savamment structurées, au  royaume secret des sorciers. Le nouveau livre de la  romancière béninoise, résidant depuis  plus de vingt ans  en France raconte, en effet, l’histoire   de trois amies, une Béninoise, une Burkinabè et une Ivoirienne vivant toutes en France. Le quotidien de chacune d’elle  est un véritable combat. C’est une série de tragédies, de drames, d’événements malheureux qui ont occupé tout leur séjour  au  « pays des Blancs ».  Cela a d’ailleurs été soldé par la mort de l’une d’entre elle (l’Ivoirienne). Cherchant à savoir  plus sur  ces épreuves à ne  pas en finir, elles  découvrent que  leurs  interminables malheurs  sont provoqués par la sorcellerie.  Des hommes et femmes dont elles ignorent les identités  ont fait obstacle à leur épanouissement nonobstant leurs  hautes études. Mais,  sont-elles  parvenues à découvrir la vérité?

La réponse à cette préoccupation, le chroniqueur  vous en épargne pour l’instant. Cependant, il vous  exhorte  à reconnaître  les langages  de vérités contenus dans ce roman.  La magie noire  y est parfaitement décrite, décortiquée de sorte que le lecteur comprendra vite la sorcellerie même s’il n’en a jamais entendu parler.  Le lecteur, en lisant  Le hiatus, même  s’il n’a jamais mis  pieds dans l’ancien Dahomey où sévit à grande échelle ce fléau, aura une vue claire sur la sorcellerie. Quelques passages l’illustrent si bien. On peut lire à la page 13 « La sorcellerie est une manière lâche et secrète de nuire  à son prochain ou de le tuer en toute impunité » ; « c’est un virus qui tue plus que le sida, mais non nul chercheur ne se préoccupe, dans aucun laboratoire ». Ou encore plus loin, à la page 23, Sophie Adonon pense : « ancêtre du réseau internet, la sorcellerie tisse une toile cabalistique dont elle couvre la planète entière ».   Outre ces  significations attribuées   à la magie noire, l’auteure   peint son livre de manière à rappeler aux uns et aux autres  certaines réalités  de la société béninoises. Des  expressions en  « Goun » et « Fon », deux langues nationales parlées au Sud  du Bénin  ont été utilisés dans le livre. C’est cela  qui fait l’authenticité culturelle  de cet ouvrage, très réaliste sur un mal qui ronge, ruine et aliène  le continent berceau de l’humanité.   Loin d’être une simple dénonciation de la sorcellerie, Le hiatus  constitue un support  de l’enseignement de l’histoire de la magie noire au Bénin.   Le lecteur y découvrira, comment la sorcellerie anéantit l’essor social d’un individu ; comment les thaumaturges se réunissent pour nuire de simples innocents ; comment  les sorciers  dominent l’univers.

Le hiatus, c’est humblement, l’écriture féministe qui a, en elle, une bonne partie de l’histoire du Dahomey d’hier.

Esckil AGBO

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Share and Enjoy !

0Shares
0 0

Comments are closed.

0Shares
0