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JMC 2017_ Imed Alibi, musicien: « La musique africaine représente 0,5% du marché mondial »

Imed Alibi est un artiste – musicien percussionniste et conseiller artistique. Depuis quelques années, il vit en France où il poursuit sa carrière artistique, laquelle, telle une courbe ascendante s’impose dans l’environnement des belles sonorités arabo- africaines. Dans le cadre de la 4ème session des Journées Musicales de Carthage (JMC), il coordonne les activités liées au coaching des artistes, les tables rondes… Dans une posture de sincérité à nulle autre pareille, l’homme regrette au micro de dekartcom l’état actuel de la musique africaine. Elle « vit une crise », se désole notre interviewé.

Lisez…

Dekartcom : Imed Alibi, quel est votre regard sur la musique africaine ?
Imed Alibi : La musique africaine vit une crise. Pour moi, elle vit une crise sur le continent africain. Mais pas dans le monde. Elle représente 0,5% du marché mondial de la musique. C’est un constat catastrophique.

En êtes- vous sûr ? Quelles sont les raisons de ce tableau sombre ?
Nos Etats, après les indépendances des pays africains n’ont pas mené un travail de structures et de politiques culturelles pour aboutir à un vrai développement des infrastructures culturelles. On a des problèmes de cadres juridiques, d’infrastructures, de structures de droits d’auteurs et de mobilité.

Nous constatons qu’il y a une migration, une fuite des cerveaux, des artistes africains vers le continent européen essentiellement. Vous connaissez des noms comme Salif Keita, Tiken Jafakoly qui ont migré mais qui reviennent pour développer des choses dans leur propre pays.

Mais ce n’est pas le cas des Etats. A l’échelle des Etats, il y a un problème de prise de conscience que la musique dépasse le divertissement, le showbiz mais c’est aussi un facteur de l’économie.

Un festival au village génère une économie locale, des commerces de proximité sur l’ensemble du territoire dans l’année. Ce n’est pas uniquement les trois jours du festival.
Il y la restauration, les hôtels, l’artisanat, la publicité, le graphiste… C’est toute une chaîne. Les pays occidentaux ont pris conscience de ce facteur, mais nous, on est encore malheureusement dans le divertissement. A cela, s’ajoute le problème de corruption.

Qu’est ce qui se passe au niveau des structures de droits d’auteurs en Afrique ?
Les artistes ne gagnent pas de l’argent sur leurs chansons qui passent à la télé, à la radio, dans les bars… L’Etat lui-même ne paye pas les droits d’auteurs. La télévision peut passer un feuilleton dans lequel il y a ma musique mais après, je n’arrive pas à récupérer cet argent. Il y a des structures, des cadres juridiques symboliques.

Il n’y a pas la pression de l’Etat sur les radios et télévisions privées pour exiger qu’elles paient les artistes dont les œuvres sont jouées. Du coup, les artistes vivent dans des situations de précarité.

Il y a des gens qui ont marqué notre enfance à la télé, après, on les voit dans un état de misère. En Tunisie, il y en a pleins qui sont morts à l’âge de 55 ans. Il n’y a pas de sécurité sociale pour les artistes. C’est un gros problème.

C’est ce qui pousse, sans doute, certains artistes africains à s’affilier aux structures de droits d’auteurs dans les autres continents ?
Oui mais, il faut dire qu’ils nous exploitent. Ils nous donnent certainement une condition meilleure mais en même temps, on est toujours dans les clichés, dans des musiques de ghetto, dans des festivals exotiques.

Que faut- il faire alors?
La situation est dans nos mains. Il faut se rappeler d’où on vient.

Réalisation : Esckil AGBO, envoyé spécial à Tunis

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