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Eve  Natacha Fanou, Plume dorée 2015 : « Je serai heureuse de travailler à démentir cette assertion »

A la base, Eve Natacha Fanou a une formation en finances. Titulaire d’un Master en Contrôle de gestion,   elle approche de très près la littérature et s’exerce, avec rigueur et abnégation  à l’écriture. Le samedi 22 août dernier, dans la grande salle du FITHEB à Cotonou,  devant parents et amis, Eve est ‘’consacrée’’ Plume dorée 2015.  Dekartcom l’a rencontrée pour vous.

Lisez l’entretien

Dekartcom : Vous êtes sacrée, plume dorée 2015 avec votre nouvelle La tranchée. Des jours après la cérémonie, comment on se sent ?

Eve N. Fanou : Bien. Capable. Heureuse

Qu’est- ce que cela fait d’être la meilleure  plume parmi tant de jeunes talents littéraires ?

La meilleure, je ne dirai pas tant. Comme me l’a dit un devancier que j’ai rencontré tout récemment lors de cette expérience rendue possible par les Editions Plurielles, il n’y a pas de meilleure dans ce domaine. Il y a juste des textes bons. Et le plus important est d’écrire avec tout son cœur. Et on l’a tous fait. Donc, je dirai que mon texte est l’un des 10 meilleurs textes reconnus comme tels lors de ce concours.

Qu’est- ce qu’on peut retenir de votre nouvelle, La tranchée ?

La tranchée, ici, s’entend comme un grand fossé, un abîme entre deux âmes de vie . Une femme, le personnage principal, qui a cru qu’elle disposait du temps et donc, se refusait à vivre certaines choses. Et un homme qui s’est vu privé plus tôt que prévu, de ce qu’il pouvait avoir. La leçon à retenir est bien sûr que nous ne disposons aucunement du temps. Le temps est une notion qui nous échappe totalement. Il faut agir, vivre et rendre le bonheur pendant qu’il en est encore temps. La vie ne tient qu’à un fil.

Comment Eve est- elle venue à l’écriture ?

Je suis de nature peu bavarde. Mais comme tout le monde, j’avais besoin  de m’exprimer ou même plus. Alors, dès l’âge de 12 ans, mon premier cahier de 100 pages s’était révélé un meilleur ami, même si silencieux à mes peurs et inquiétudes d’adolescente. Avec le temps, ce besoin de mettre des mots sur un sentiment, une émotion ou une peur s’est mué en un besoin de créer, de donner vie à partir d’eux. C’était intéressant de pouvoir vivre, à partir d’un simple stylo, tant de vies. Et surtout, les encouragements de mes lecteurs, j’entends mes camarades de classe, me motivaient à continuer. C’était ma manière de me relaxer. Et c’est toujours mon premier  hobby aujourd’hui.

Pensez- vous faire carrière dans l’écriture ?

Comme je vous l’ai dit, j’écris depuis plusieurs années, depuis mon cours secondaire. Et j’écris par besoin. Donc oui, je continuerai dans ce sens.

Vous estimez  qu’on peut vivre de la littérature (métier d’écrivain) au Bénin ? Si oui, qu’est-ce qui vous fait  dire cela ?

Certes c’est très difficile mais c’est bien possible. Le temps et les solutions innovantes devraient être des alternatives. Et je sais que mon éditeur y travaille.

Parlant de l’écriture féminine au Bénin, Florent Couao Zotti, dans l’une de ses chroniques a dit qu’il s’agit d’une littérature discrète et poussive. Votre point de vue sur cela.

Que la littérature féminine au Bénin soit discrète, c’est une évidence. Mais un travail est en cours et il paiera, j’en suis sure.

Florent, en s’exprimant ainsi, n’est- il pas en train de considérer l’écriture au Bénin comme l’apanage des hommes ?

Je serai heureuse de travailler à démentir cette assertion. Je dirai néanmoins qu’aucune activité n’est exclusivement l’apanage des hommes. Encore moins, une activité imaginative et créative, qui demande du cœur et de l’intuition, et qui parle des choses de la vie, de sentiments.

Lorsqu’on jette un coup d’œil sur les ouvrages au programme dans les lycées et collèges, on constate qu’il n’y aucune œuvre de femme béninoise. Aucune fille du pays n’est mise au programme. Vous en dites quoi ?

Il n’y a d’ailleurs pas beaucoup d’ouvrages béninois au programme dans nos lycées et collèges. Je dirai tout de même que tout est question de temps. Nous en viendrons là.

Les femmes béninoises, n’ont- elles pas  de belles plumes ?

Des femmes béninoises à belles plumes. Carmen Toudonou, Sophie Adonon, Adélaïde Fassinou par exemple. Les plus belles choses de la vie ne sont-elles pas faites par les femmes ? Donner vie par exemple. Je pense qu’il nous faut beaucoup de soutien pour émerger de l’ombre car pour moi, c’est une évidence qu’il y a plein de talents féminins inconnus au Bénin. Dans notre société, nous savons tous la place qui est avant tout reconnue à la femme. Et quoi qu’on dise, nos réalités culturelles demeurent ce qu’elles sont. J’imagine et j’avoue qu’il est un peu difficile de combiner ces responsabilités et activités sans un soutien permanent de la famille. Pour ma part, je n’aurais pas pu sans. J’en profite pour les remercier d’ailleurs.

Dans un tel un climat, est- ce que la femme du Bénin a encore de raisons pour écrire ?

Vous conviendrez avec moi que les obstacles n’ont jamais été une raison pour arrêter de faire ce dont on se sait capable. Encore plus quand on sait ce contexte  défavorable changeant. En matière sociale, rien n’est figé. Donc oui, ces femmes doivent continuer à écrire.

Dans ce cas, la femme béninoise, notamment celle qui vit au pays, peut-elle faire  carrière dans l’écriture ?

Non. Elle le doit.

Vous en connaissez  qui y font carrière? Si oui,  donnez- nous  deux ou trois noms.

Non, je n’en connais pas encore. Je l’avoue.

Qu’est- ce que vous avez souhaité dire et que nous n’avons pas évoqué ?

J’aimerais profiter de ce canal pour à nouveau remercier les Editions Plurielles et ses partenaires car sans eux, je ne serais pas là aujourd’hui. Le concours « Plumes Dorées » est apparu comme une bouée dans un monde sans issu. Il n’en existe pas deux de ce genre actuellement. En tout cas, je n’en connais pas. Alors, je souhaite la pérennité du projet et espère que le portefeuille de partenaires soit plus large pour qu’ils aient une plus grande capacité d’actions. Car des jeunes talents inconnus, il n’en manque pas. Je m’avance plus loin en disant qu’on espère pouvoir suivre leur pas dans quelques années car un bon exemple, ça se suit.

Réalisation : Esckil AGBO/ @dekartcom.net

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