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Bénin _ Patrimoines : Le Sato, du sacré à la scène

Rythme pratiqué au Sud du Bénin, notamment dans les départements du Zou et de l’Ouémé/Plateau, le Sato fait partie intégrante de la liste du patrimoine immatériel de ce pays. Au delà d’un rythme, c’est d’une danse, laquelle est exclusivement exécutée par les orphelins. Le 20ème numéro du Vendredi des Patrimoines et du Tourisme vous conduit dans l’univers de cet élément patrimonial…

A Covè, dans le département du Zou ou à Pobè dans le plateau, le Sato continue de résonner. On le sort quand il y a décès d’une personnalité, d’un dignitaire ou d’un prêtre vodoun. Il se joue donc lors des cérémonies funéraires.

Mireille Adémée Gbahounmè, Conservatrice du Musée Hounmè de Porto- Novo précise : « c’est un rythme qui est joué pendant les cérémonies funéraires. Lorsqu’une personne influente meurt, les enfants ou l’enfant du défunt doit sacrifier à la tradition en jouant au tambour avec la main gauche si le défunt est un homme et avec la main droite s’il s’agit d’une femme. Les orphelins de père et de mère jouent le Sato avec les deux mains. Au rythme de la chanson, ils doivent tourner autour du tambour en le tapant jusqu’ à le percer. A partir de ce moment, on considère que l’âme du défunt est définitivement partie dans l’au-delà »

« Le tambour sacré participe au passage du défunt du monde visible à celui invisible », vient compléter le socio-anthropologue Alain Houssou dont la thèse de doctorat a porté sur « Les tambours sacrés en République du Bénin ». Selon lui, le Sato porte un discours, un langage et constitue une institution, laquelle véhicule l’identité du peuple béninois.

Mais qu’est – ce que le Sato en réalité ?
C’est un couple de tambours sacrés, le male et la femelle. Respectivement haut de 1m75 et 1m60, les deux sont couverts de peau d’animal et sont accompagnés, lors de l’exécution de la danse d’autres tambours, petits, et de gongs. A en croire le docteur Alain Houssou, au nombre des tambours- accompagnateurs, on note, le gbéhoun, ahomidon et alangandan.

« Le Sato est joué dans un lieu secret appelé Gbétodji. C’est là bas que le maître du tambour sacré apprend aux orphelins comment on le joue parce que ce sont des initiés formés qui peuvent s’y approcher », souligne le sociologue avant mettre en garde : « lorsqu’on veut transporter le Sato, il n’est pas permis de regarder dans l’orifice qui est en bas sinon, automatiquement, l’orphelin peut découvrir le visage du parent défunt et si on ne se presse pas pour l’initier, il pourrait bien trainer à vie des séquelles ».

C’est aussi une « danse envoûtante, engagée », nous append Marcel Zounon, Directeur de l’Ensemble Artistique National.

Du sacré à la scène


Jouer au Sato, indique Dr Houssou, est un art. Et qu’on l’accepte ou qu’on le rejette comme tambour sacré, il est comme le guèlèdè, un patrimoine immatériel du pays.

Pendant longtemps, renseigne le Professeur Dodji Amouzouvi, « c’est un regard exotique et sensationnel qui est porté sur ce rythme. Ce sont les choristes et les vendeurs d’illusion qui s’en préoccupaient. Donc, c’est la littérature para – sociologique et para- anthropologique qui le présentaient et, forcément, vous serez d’accord que si on le présente de cette manière, on y voit plus un objet d’attirance que sacré ».
C’est sans doute, cet aspect qui conduit les responsables des compagnies de ballet et de danse à le mettre en scène. Aujourd’hui, il est fréquent de voir des spectacles de danse où le Sato, à la faveur d’une bonne chorégraphie, est exécuté.

Marcel Zounon revient sur cela : « avec l’invasion de la culture occidentale, tout ce qui est sacré, tout ce qui est rituel a commencé par tomber dans le domaine public de sorte qu’aujourd’hui le rythme Sato est abordé par certains groupes de danses dont le ballet national, les supers anges, les As du Bénin… Cela fait notre fierté ».

La sacré n’est pas tombé dans le domaine public, semble lui répondre le docteur Alain Houssou. Il clarifie : « tous les tambours que nous voyons ne sont pas tous de vrais Sato puisqu’il y a le tandem Loko- Sato ou Iroko (arbre- fétiche). Le tambour Sato est toujours sculpté dans l’Iroko dans la forêt profonde et il a son temple : le Satohô (case du Sato). Ce que les gens convergent vers les lieux publics de réjouissances folkloriques ou d’animations folkloriques n’est jamais sculpté en Iroko mais en samba (arbre ordinaire) ».

L’aspect sacré et rituel, organisateur de la société demeure et restera toujours protégé », conclut le Professeur Dodji Amouzouvi.

Esckil AGBO

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