Un artiste, selon le Grand Robert est une personne qui se voue à l’expression du beau, qui pratique les beaux- arts. C’est quelqu’un qui côtoie un métier dont on remarque la créativité, la poésie, l’originalité de ses productions, de ses actes et de ses gestes. C’est un individu comme tout autre. Mais ses mots, paroles et comportements sont sources d’émotions, de sentiments, de réflexions et de spiritualité. Bref, un artiste, ‘’ce n’est pas n’importe qui’’. Qu’il s’agit du plasticien, du musicien, du comédien, du slameur, l’artiste représente pour les autres citoyens un créateur. Les artistes sont des dieux. Point. Et parmi eux, les plus en vue ce sont les musiciens. Ce sont eux que les populations voient le plus. Les hommes et femmes de la musique sont les plus nombreux dans le rang des artistes. Ils sont les plus sollicités. Ils sont sur tous les terrains. Aux meetings de remerciement en faveur du Chef de l’Etat, ils sont là. Aux messes ou prières de protection pour le Docteur- Président, ils sont présents. Congrès constitutifs d’un nouveau parti politique, ils sont encore là. Universités de vacances d’anciens partis politiques, ils sont toujours présents. Les artistes musiciens du pays du Regretté Gnonnas Pédro sont partout et en tout lieu. Vous les voyez aujourd’hui avec la mouvance. Demain, ils sont dans les grâces de l’opposition. Après demain, c’est la société civile qui les accueille dans leur cercle. Mais ils ne manquent pas de se présenter par moment sur le terrain qui leur est propre : les concerts et lancements d’album. A chacune de ces occasions, les professionnels du son ne ratent pas d’égayer le public. C’est leur rôle ! Certes, ils en font une aubaine pour quémander, tels des mendiants devant les églises et pharmacies, de sous. Le micro, à peine saisi, ils abandonnent leurs instrumentistes sur la scène et sont en bas, près des autorités politico- administratives venues suivre le spectacle. Les mains tendues, ils mettent tout en branle pour inciter ces dernières à mettre la main dans la poche. Les femmes, portant violement atteinte à la pudeur, vont jusqu’à poser leurs fesses, adipeuses, sur les cuisses des responsables politiques, époux d’autres femmes. Des gestes qui font applaudir les spectateurs, qui les mettent en extase mais qui n’honorent point l’artiste lui- même. Jadis, quand le chanteur, au milieu de ses percussionnistes et danseurs prestent, ce sont les autorités qui abandonnent leurs fauteuils, se dirigent vers lui et l’encourage, le félicite, le remercie pour son travail de génie par des billets de banque. Aujourd’hui, c’est tout le contraire. Et ce n’est pas tout. L’autre pratique devenue coutume et qui entache la corporation artistique au Bénin est l’appel au secours que lancent tous azimuts les artistes. A peine tombé malade, l’artiste va s’asseoir devant les institutions de l’Etat pour exiger qu’on vienne à son secours. Ceci parce qu’il travaille pour la nation. Il va jusqu’à dire que les autorités du pays l’ont abandonné et que personne ne s’occupe de lui. Quel est le citoyen qui ne travaille pas pour la nation ? Le menuisier, le maçon, les soudeurs, les couturiers, les vendeuses dans les lycées et collèges, celles des marchés, les infirmiers et infirmières, les forces de l’ordre, les enseignants…, tous, à l’instar de l’artiste travaillent pour l’épanouissement de la société. Et pourquoi, c’est l’artiste qui se livre à ce spectacle honteux. Lui qui est un créateur. Chers artistes, vous n’êtes pas si pauvre pour tendre tant la main ! Soyez un peu orgueilleux.
Esckil AGBO