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Bénin_ Gratien Ahouanmènou : « Il est important d’enseigner les origines égyptiennes du Fâ à nos enfants »

Le Fâ est une science et non une religion. C’est ce que démontre le poète béninois et chercheur en savoirs endogènes Gratien Ahouanmènou dans cette interview dont voici la teneur. Il est le huitième invité de notre rubrique L’invité de la semaine.

Lisez….

Dekartcom : M. Gratien Ahouanmènou, vous êtes poète et chercheur en savoirs endogènes. Depuis quelques années, vous vous consacrez au Fâ encore appelé Ifa. Dites- nous, qu’entendez-vous par système Ifa.
Gratien Ahouanmènou : (Il reste silencieux quelques secondes). Je vais vous proposer une définition rimée :

IFA, c’est quoi ?
Tenant d’une pictographie octale et binaire
Structurant une sagesse prévenante et salutaire
Le système IFA est une véritable science séculaire
Qui guide l’homme pour accomplir sa mission sur terre.
Le Fâ est une science ; ce n’est pas une religion. Nous l’avons hérité de nos ancêtres et c’est l’apanage de la civilisation yoruba.

Dans nos recherches lors des préparatifs de cette interview, nous avons appris que l’origine du Fâ remonte à l’Egypte. Confirmez- vous cela ?
Absolument ! Les historiens ont établi la source du Fâ dans l’Egypte ancienne. Des millénaires avant l’ère chrétienne, les prêtres de l’Egypte ancienne pratiquaient cette science. Nous tous, peuples d’Afrique de l’Ouest, nous sommes des migrants venus de la vallée du Nil. Certains peuples ont gardé cette science ancestrale, notamment les Yorubas au Nigéria, les Bambaras et les Dogons du Mali.

C’est une science qui a été malheureusement diabolisée par les missionnaires et les Colons qui sont arrivés vers nous non pas pour fraterniser mais pour dominer et imposer leur culture, considérant qu’on était des peuples inférieurs et que, eux, issus de la race supérieure, devaient nous évangéliser et nous civiliser. Je pense que c’est une imposture. Aujourd’hui, même les plus hautes autorités européennes et chrétiennes prônent le dialogue des cultures et des religions parce qu’elles sont conscientes du fait que la hiérarchie des races est une ineptie.

Le système Ifa est une science. A vous en croire, il n’y a pas de doute à cela. Mais toute science a une base. Qu’en est- il pour le Fâ ?
Le Fâ a une base binaire. Aujourd’hui tout le monde connaît l’informatique à travers les ordinateurs et surtout les téléphones androïdes. Mais la base de l’informatique est la logique binaire. Cette logique n’a été théorisée en mathématique qu’au milieu du 19èmesiècle, par l’algèbre de Boole. Elle a abouti au milieu du 20ème siècle à la science informatique que nous connaissons aujourd’hui. Beaucoup de personnes ignorent que cette logique binaire est la base du Fâ qui la symbolise par deux signes fondamentaux.

Le trait simple (I) symbolise la face creuse ou concave d’un cauris et le double trait (II) en symbolise la face bombée ou convexe. Les symboles changent en informatique (0 et 1) mais la logique est rigoureusement la même. Sivous prenez ces deux valeurs-là (I et II) pour illustrer les quatre éléments de la nature qui sont reconnus par toutes les civilisations humaines (la terre, l’eau, l’air et le feu), on a deux valeurs etquatre éléments ; tout calcul fait, 24=16.

Tableau Géomantique

Tableau Géomantique

Alignez verticalement les deux signes de base du Fâ (I et II) par séries verticales de quatre, vous obtiendrez seize combinaisons possibles et imaginables qu’on peut appeler des pictogrammes ; c’est rigoureusement mathématique.

Ces seize pictogrammes constituent une sorte d’alphabet ; c’est l’alphabet géomantique du Fâ qui attribue un nom précis à chacun de ces pictogrammes.

Quand, selon la logique binaire du système, on associe ces seize pictogrammes deux par deux, on obtient alors 256 (16 x 16 = 256 ou 1 octet) couplets de pictogrammes qu’on peut qualifier d’idéogrammes. Nous croyons tous avoir découvert l’octet avec la science informatique mais quand on prend le chapelet du Bokônon (prêtre du Fâ), on constate qu’il est constitué de huit demi-coques de noix ; or, la définition du mot octet dans le dictionnaire est : ensemble de huit éléments binaires. C’est exactement la description du chapelet géomantique.

Est- ce qu’on peut donc déduire que le Fâ est l’ancêtre de l’informatique ?
Indiscutablement. Cela a été d’ailleurs démontré en France par un ancien Conseiller de François Mitterrand, sur le plateau de l’émission Salut les terriens animée par Thierry Ardisson sur Canal+. Selon Jacques Attali, « Les Africains ont inventé l’ordinateur numérique bien avant qu’on le découvre. Ils ont inventé une façon de prévoir l’avenir qui est exactement ce qu’on appelle le code booléen en mathématiques modernes et qui a donné l’ordinateur numérique d’aujourd’hui. On sait très bien comment cela s’est passé : au Xe siècle, c’est passé de l’Afrique de l’ouest jusqu’à Cordoue par les marchands arabes puis, de Cordoue jusqu’en Hollande et c’est là que Leibniz puis d’autres ont inventé le calcul numérique ».

Jacques Attali, un Européen pur-teint, reconnait que la racine de la science informatique est en Afrique… C’est clair et net, c’est scientifique et incontestable, le Fâ est l’ancêtre de l’informatique. J’attends qu’on me démontre le contraire.

Quel est le regard des peuples africains contemporains sur le Fâ ?
Je dirais que 80% de la population non lettrée du Bénin méridional, connait et respecte le Fâ. Ce sont les 20% de lettrés qui ont été extravertis et aliénés par l’école coloniale et l’évangélisation. C’est nous les gens instruits, qui sommes des déracinés.

Que faut-il faire ?
Il est urgent que nous nous réconciliions avec ce patrimoine inscrit sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO. C’est ce à quoi je tente de contribuer avec ma troupe, les Messagers pour Raviver la Flamme Ancestrale (MRFA), en expliquant de manière rationnelle et accessible le système Ifa. Si vous avez eu l’occasion de suivre notre spectacle qui s’intitule « Notre boussole ancestrale », vous comprendrez qu’en 45 minutes, nous expliquons deux choses essentielles : la base binaire du système Ifa et sa sagesse existentielle et universelle.

C’est l’occasion de saluer l’engagement des quatre talentueux artistes qui m’accompagnent dans cette aventure patrimoniale ; il s’agit d’Alfred Fadonougbo (comédien), Adébayô Hounsou (conteur) et des deux jeunes slameurs, Gopal Das et Amagbégnon Eklou.
Je ne vois pas ce qui empêche l’enseignement de cette sagesse-là dans nos écoles.En vertu de quoi, ce que nos ancêtres nous ont légué doit être jugé maléfique et diabolique ? Dans nos écoles,on n’enseigne que la connaissance de nos anciens colonisateurs et dominateurs.

Il est temps que notre système éducatif introduise un peu de nos savoirs endogènes, un peu de nos langues et un peu de notre histoire véridique dans nos écoles. Je pense qu’il est important d’enseigner les origines égyptiennes d’Ifa à nos enfants. L’extraversion et le déracinement, c’est le scandale auquel nous essayons de remédier par une dynamique constructive et non par la révolte. Je le fais à longueur de publications, de conférences, d’émissions et avec ce spectacle.

Nous espérons mobiliser des ressources pour faire une tournée en milieu scolaire et universitaire, parce qu’il nous importe de réconcilier la jeunesse avec ce patrimoine.

Comment est née la création Notre boussole ancestrale ?
J’ai découvert le Fâ dans un livre. Aujourd’hui, j’ai 61 ans. En 2009 quand j’ai découvert le livre patrimonial du docteur Adjou-Moumouni qui s’intitule Le Code de vie du Primitif ; sagesse africaine selon Ifa (en 4 tomes), j’ai été ébloui par la lumière qui émanait de cette sagesse-là. J’ai dévoré les quatre tomes en trois mois et j’ai demandé à l’amie qui m’a prêté le livre de m’introduire auprès de l’auteur. Je suis allé à sa rencontre et cet homme extraordinaire s’est prêté à ma curiosité, a répondu à mes questions et m’a adopté. Pendant 53 ans j’avais retenu des préjugés qui m’ont été transmis que le Fâ était une pratique obscure. La lecture de ce livre et les éclaircissements de l’auteur m’ont révélé que nous avons hérité d’une science extraordinaire et d’une sagesse universelle.

Alors j’ai décidé de la vulgariser. C’est ainsi qu’à partir de 2011, j’ai fait des publications et animé des conférences. C’est à l’occasion d’une de mes conférences, en juillet 2013, que le professeur Jérôme Carlos, très intéressé, m’a félicité et m’a fait une recommandation. Estimant que mon approche était intéressante mais trop élitiste, il m’a alors ordonné de transformer ma conférence en spectacle qui puisse être joué dans une cour de collège. C’est ainsi qu’est né le spectacle didactique et patrimonial intitulé Notre boussole ancestrale.

La première représentation a eu lieu le 06 décembre 2014 à l’ouverture du colloque du FITHEB et la plus récente, le 09 août 2016 à l’ouverture de la semaine culturelle du Haut Conseil des Béninois de l’Extérieur (HCBE).

Réalisation : Esckil AGBO / ©Dekartcom_2017

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